Société des Missions Africaines – Province de Lyon
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né le 16 septembre 1929 à Chazelles-sur-Lyon dans le diocèse de Saint-Etienne membre de la SMA le 27 juillet 1952 prêtre le 20 novembre 1955 décédé le 23 septembre 2012 |
1956-1957 Pont-Rousseau, professeur décédé à Montferrier le 23 septembre 2012, |
Le père Pétrus REYNARD (1929 – 2012)
Il est né à Chazelles-sur-Lyon (Loire), autrefois capitale de la chapellerie, dans le diocèse de Saint-Etienne. Bien sûr, son papa était chapelier. Ils étaient trois frères, mais deux d’entre eux sont décédés à 9 et 13 ans. Il fréquente l’école libre de Chazelles, avant de rentrer au petit séminaire de Chamalières, puis de Pont-Rousseau de 1943 à 1949. Fatigué pendant l’année scolaire 1948-1949, ses supérieurs préfèrent qu’il fasse son service militaire (1949-1950) avant le noviciat. Il en fait la plus grande partie en Allemagne, à Baden. Il faut noter ici l’excellence du rapport de son aumônier militaire : « Pierre Reynard, par sa tenue, sa conduite, sa piété, son zèle, son obéissance a été un séminariste modèle qui a produit ici la meilleure impression. […] Les éloges que lui ont adressés son Excellence Monseigneur l’Aumônier Inspecteur et le cercle catholique des officiers et des sous-officiers de Baden en sont la meilleure preuve » (03/02/51).
Après deux années à Chanly, noviciat et philo, il rentre au grand séminaire de Lyon, au 150 cours Gambetta. Ayant 26 ans au début de sa quatrième année de théologie, et sachant que Rome accordait la permission d’être ordonné à la fin de la 3e année, à condition d’avoir 26 ans, il va trouver son supérieur à la rentrée d’octobre. Ce dernier lui répond : « Trouve un évêque ». « Je suis allé voir un compatriote que le pape venait de nommer évêque auxiliaire de Lyon, Mgr Dupuis ; Le Seigneur fait bien les choses. » Il est ordonné le 20 novembre 1955. Dans son homélie, le jour de son jubilé d’or, il dira : « Cette date est providentielle pour moi, car le lendemain, j’ai célébré ma première messe en la fête de la Présentation de la Vierge Marie au temple. Ses parents, Anne et Joachim, ont offert à Dieu leur unique enfant. Mes parents ont donné la vie à trois garçons. Deux sont morts et ils ont donné au Seigneur le dernier comme prêtre et missionnaire » (20/11/05).
Nommé professeur à Pont-Rousseau, il n’y reste même pas une année entière, car déjà on pense à lui pour être recruteur. Dès le mois d’avril 1957, il est mis à la disposition de Mgr Duirat, le vicaire apostolique de Bouaké, pour « apprendre » l’Afrique en quelques mois (un vrai défi !), car dès janvier 1958, il doit commencer son travail de recruteur. Il se documente et prend des diapositives, mais il avoue : « Ma connaissance des Africains est superficielle, car il faut des années pour les comprendre, mais je crois avoir saisi la trame de la vie missionnaire. A mon idée, c’est l’essentiel. […] Pour parler aux garçons de France, j’insisterai sur les difficultés, car elles sont le pain quotidien et la source de joies profondes, afin de ne pas entretenir en eux le simple goût de l’aventure, mais les amener à plus de générosité » (de Korhogo, 18/10/57).
Le voilà maintenant recruteur dans l’ouest de la France. Pour alimenter sa caisse de recruteur, il obtient de la Province la permission de monter une exposition à la foire de Poitiers (17/02/61). Il écrit : « J’ai sillonné le pays nantais et ses abords pendant 4 ans, parlant de la vie missionnaire aux enfants des écoles, aux jeunes des collèges, prêchant dans les paroisses, présentant le montage diapos et répondant aux questions des gens. C’est là que j’ai connu le goût des huîtres et du beurre salé. » Il est aussi aumônier d’une troupe scoute. Un curé qu’il était venu seconder pour les offices de la semaine sainte, à la fin de la messe, le jour de Pâques, remercia chaleureusement le père « Peynard » de son concours. Les assistants ont bien souri.
En décembre 1961, en l’envoyant au vicariat de Porto Novo, le Conseil note : « Réussit très bien dans l’apostolat auprès des enfants. A mettre de préférence dans le ministère. […] Charmant confrère aux relations très cordiales » (06/61). Il est chargé, avec le père Paul Perrin, d’ouvrir un petit séminaire. Mais, en 1963, sa maman étant bien malade il obtient du provincial l’autorisation de rentrer : elle décède peu après. Il reste à Chaponost à cause de son papa qui est seul désormais et de faible santé, et le Conseil provincial le nomme là « pour la tâche que le supérieur voudra bien lui confier » (15/06/63). Il sera professeur, puis économe, puis procureur. En juin 1964, il est même nommé directeur de la maison en remplacement du père Roger Stéphan. En 1966, il pourrait repartir en Afrique, mais comme son papa n’a plus que lui, il demande à rester pas trop loin de lui et déjà il se propose pour prendre une petite paroisse dans la région Rhône / Loire. Il se fait un peu tirer l’oreille pour accepter le poste d’économe en remplacement du père Thomas nommé à Saint-Briac en 1966, mais il ne semble pas à l’aise à Chaponost. Il écrit plusieurs fois au Conseil provincial pour se plaindre de l’ambiance de la maison. Il demande alors à être relevé de l’économat pour ne garder que les foires, avec l’entretien du jardin et de la propriété.
En 1968, une lettre du père Falcon, provincial, lui annonce que la maison de Chaponost devient centre de rayonnement sma, foyer d’accueil de jeunes et maison de repos, annexe de la Croix-Valmer si nécessaire ; de plus, les deux procures de Chaponost et de Lyon sont maintenant jumelées, et il en devient le responsable : « Le Conseil provincial vous confie la direction de la procure ; il vous faudra unifier les deux fichiers et intensifier la participation aux foires » (02/08/68). En janvier 1969, il est nommé vice-supérieur de la maison. L’année suivante, remplacé par le père Fortin à l’économat et à la procure, le Conseil provincial le met alors à la disposition du régional de Côte d’Ivoire pour le vicariat de Bouaké, avec autorisation de faire, avant de partir, le stage d’automne de l’Arbresle.
Après une année à Ouellé, il est nommé responsable à M’Bahiakro où il va rester 8 ans. Pour toutes les dépenses de la paroisse, il arrive à boucler le budget de l’année avec l’aide de ses bienfaiteurs, et il y met aussi du sien. Les catéchismes, les visites, les réunions, les rencontres, les constructions pour la mission ne l’empêchent pas de mettre la main à la pâte en travaillant pour des particuliers : « Le Seigneur m’a donné deux mains et je les utilise pour faire vivre la mission. Aujourd’hui, j’ai monté un plafond dans une maison et demain j’y ferai l’installation électrique. […] Mes ‘clients’ sont de petites gens et leur nombre augmente. […] Malheureusement, par manque d’argent, je ne peux me constituer un petit stock de matériel et je dois acheter au prix fort chez les marchands de la ville. Il me faudrait un prêt de 250.000 francs pour avoir une réserve de matériel électrique, de fer à béton, de portes et de fenêtres, afin de satisfaire immédiatement la demande. […] Si vous pouvez m’aider, j’en serais heureux, si vous ne pouvez pas, je ferai de mon mieux sans acrimonie » (11/05/75). Avant de quitter M’Bahiakro pour M’Batto, il a la grande joie d’accueillir son papa, dont le décès deux ans plus tard le touchera profondément : il était très proche de son papa, surtout depuis le départ de la maman 18 ans plus tôt.
En 1980, à son retour de congé, il est nommé à M’Batto et y trouve comme curé le père Gérard Landais avec qui il fera une excellente équipe. Plus tard, lorsque Petrus sera curé de Chavanay, le père Landais et sa famille viendront volontiers lui rendre régulièrement visite, preuve des très bons rapports qu’ils ont entretenus quand ils travaillaient ensemble en Afrique. Avec le temps, il a quelques problèmes de relation avec son évêque et, en 1985, il envisage de demander un changement de diocèse : il choisirait volontiers le diocèse de Daloa où il a des amis et où il pourrait utiliser le baoulé qu’il connaît. Le Conseil en décide autrement et lui demande alors de prendre son congé et de rejoindre la maison de Rezé où il pourra travailler à l’économat. Il prend alors une année de repos, mais bien vite l’Afrique l’appelle. Dès le mois de mars 1987, Mgr Yao a fait savoir au Conseil provincial qu’il attendait le retour de Pétrus au diocèse de Bouaké. Ce dernier écrit alors : « Ta lettre me rassure quant aux sentiments de Mgr Vital, et s’il souhaite que je revienne dans son diocèse, eh bien moi aussi je demande à retourner chez lui. Tu peux lui dire que le passé, c’est le passé et que je suis prêt à servir encore de nombreuses années le pays baoulé » (19/03/87).
A Béoumi, il prend la place de Gérard Boullery nommé à Yamoussoukro. « Cette année, je vais donc me retrouver seul et je vais m’organiser en conséquence sans aucun problème. Quand on sort de M’Batto où c’était l’usine, on est rodé. […] Je formule le vœu que Louis Roland vienne me rejoindre. […] Tous deux, nous formerions une bonne équipe, car nous sommes de la même génération » (29/10/87). Plus tard, il précise son travail : « Je visite mes 11 communautés une fois par mois ; […] j’ai des rencontres avec des professeurs sur des sujets qui me demandent de lire beaucoup. Je fais ma cuisine, un peu de bricolage, et le soir je trouve mon lit avec plaisir. Pas besoin de télévision pour m’endormir.[…] Il y a une chose que je viens d’apprendre, c’est que l’effort intellectuel peut provoquer une hernie » (20/06/88). Il se fait voler 10.000 francs chez lui, mais les voleurs n’ont pas ouvert le coffre. « Dès demain, j’aurai une porte en fer à mon bureau et au magasin des fournitures scolaires » (21/09/88). C’est aussi à Béoumi qu’il commence à avoir des problèmes de santé : des crampes dans les jambes et les orteils, la nuit, qui l’obligent parfois à se lever pour atténuer la douleur : « Cela pourrait provenir d’une mauvaise circulation du sang. Pourtant je me sens en forme, et je n’ai pas de malaise (16/03/90).
Au bout de trois ans, il est nommé à Tiémélékro où il doit achever l’aménagement de la nouvelle mission. « J’ai fait 160 mètres de clôture sur un sol marécageux, […] j’ai acheté tout le matériel de cuisine, car il n’y avait plus rien. Je n’avais pas un drap, pas une serviette. Bureau, chambre, cuisine étaient vides. […] J’ai fait moi-même les étagères en dehors de mon service dans les villages » (17/02/92). Le Conseil provincial lui écrit qu’il a besoin de lui pour Chaponost pour octobre 1992, alors que Pétrus aurait voulu rester à Tiémélékro au moins jusqu’en 1993. Il accepte : « Ma décision est prise. Je rentre définitivement. Je continuerai mon apostolat missionnaire en accueillant les groupes à Chaponost, en répondant aux bienfaiteurs, et en étant un hôte agréable pour les confrères de passage. Mais avant tout, je serai un confrère et un collaborateur pour le père Lagoutte que je connais un peu » (03/05/92). Il est nommé pour trois ans renouvelables. Comme il l’avait écrit, il manifeste une très grande disponibilité pour aider à l’économat, aider à la procure, aider à l’animation missionnaire. Mais, vite, il s’ennuie : « C’est le local qui intéresse les groupes, pas les pères. […] Notre rôle consiste à ouvrir et fermer les portes. […] J’envisage de prendre une cure ou de repartir en Afrique. Je ne veux pas devenir neurasthénique » (27/12/92). Il ne veut pas traîner le reste de ma vie dans un bureau. Avec l’accord de ses supérieurs, il va chercher une paroisse dans son diocèse.
Depuis qu’il n’a plus son papa, il a bien une chambre à la cure de Chazelles avec tous ses propres meubles à l’intérieur. Le curé est très bon pour lui et aide beaucoup les trois pères sma de Chazelles, les pères Gonon, Reynard et Véricel (honoraires de messes et la quête d’un dimanche pendant les congés), mais à 64 ans, il peut encore prendre la charge d’une paroisse dans son diocèse de Saint-Etienne. En septembre 1993, il est nommé à Chavanay, au bord du Rhône, une paroisse qui regroupe trois clochers. Il y est très heureux et va y rester 15 ans. Il pourra même apporter à la cure ses meubles de famille. Il était là comme chez lui. Il disait que ses paroissiens de Chavanay étaient sa nouvelle famille et ils le lui rendaient bien. Ils faisaient tout pour le garder, car, à cause du manque de prêtres, ils savaient bien que, le jour où il partirait, il ne serait pas remplacé. Avec le temps, il connaissait tout son monde. Les familles, il les a toutes vues les unes après les autres : si ce n’était pas pour un baptême, c’était à l’occasion d’un enterrement.
Une alerte de santé en décembre 2001 : il perd connaissance au cours de la messe. Les pompiers interviennent, un docteur le conduit à l’hôpital où il reste deux semaines en examens divers. Il dit qu’il n’a pas de trace d’embolie pulmonaire, mais les symptômes de la maladie de Parkinson, qui étaient déjà assez manifestes chez lui, vont désormais aller en s’accentuant. Dans la célébration de la messe, il aura parfois bien du mal à saisir le calice pour la communion. En 2005, quand il célèbre son jubilé d’or dans cette paroisse, en remerciant tous ceux qui ont participé à la préparation de la fête, les trois municipalités, ceux qui lui ont écrit, il dit à la fin de son mot de remerciement : « A tous, je dis que je suis un prêtre heureux qui souhaite servir encore quelques années en paroisse, et auprès de mes amis aveugles et malvoyants venus nombreux me témoigner leur amitié. » Ce jour-là, il reçoit la médaille de la ville de Chavanay des mains du maire, M. Edouard Roche.
Il accepte d’aller à Montferrier en 2008. Calme, discret, effacé, il va mener une retraite tranquille jusqu’à ces derniers mois où, se sentant de plus en plus fatigué, il consulta le médecin qui le dirigea sur l’hôpital. Là, on décela deux tumeurs, mais il était déjà trop tard pour une intervention chirurgicale. Il s’agissait seulement d’atténuer ses souffrances. Pour son enterrement à Montferrier, une cinquantaine de personnes, parents et amis, venues de Chazelles ou de Chavanay avaient fait le déplacement, témoignant ainsi de leur attachement pour leur cousin ou leur ami, ou pour manifester leur reconnaissance à leur dernier curé.